Sur le papier, le fusain a bavé.

Le noir a coulé comme une rivière de graviers.

Les ténèbres se sont ici bas invitées.

Sur le papier, le dessin est ombré.

La relation a changé, oui, c'est sûr. Je marche sur des chatons en essayant de faire attention. Mais ce lien existe encore, cette énergie passe encore. Ton oxygène me parvient et mon visage en change. Tout le monde le remarque.

C'est comme quand la radio passe du mono au stéréo. Tout gagne en profondeur, en sens, quand tu existes. Fais l'expérience, tu comprendras ce que ça signifie. J'étais aveugle, maintenant j'y vois. Tu m'as dit de me lever et de marcher.

Tu me dis que tu es fragile, entièrement ouvert. J'ai une image en tête, de deux être qui écartent leur peau avec une fermeture éclair pour montrer leur chair l'un à l'autre. Leurs blessures. Leur coeur. Oui, nous sommes fragiles. Nous. Et oui, nous pouvons nous détruire. Forcément.

Je sais où appuyer pour te faire rire,

souffrir même,

déposer des oiseaux autour de tes os

pour t'offrir la sensation de voler

Nous sommes deux mais un seul à la fois.

Tous les autres n'étaient que des morceaux de toi que j'ai attrapé au fil du temps, ils volaient et je les ai attrapés. Mais ce n'était pas toi, et malgré mes tentatives pour les assembler, mes tentatives de montage photo, mes découpages et collages, on voyait bien que ce n'était pas toi.

Je ne sais pas d'où tu viens. Mais c'est sûr, tu es toi pour moi. Et moi, pour toi. Tout ce qui s'est passé, c'était pour que l'on se rencontre. Tout. On nous a portés pour nous déposer ensemble sur une digue de béton au bord d'une rivière, on nous a fait tomber pour ralentir nos progressions et que nous puissions nous rencontrer.

On tombe encore.

Mais quand on marche sur le bord des trottoirs, parfois, ça arrive.

Du moment qu'on ne se fait pas écraser par un bus, cela suffit.

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Un peu d'ombre