Salut.

Je ne sais pas si tu me lis encore. Je sais que tu existes, puisque je te vois me fermer ta porte. Enfin, c'est normal, j'ai commencé.

Salut.

Je voudrais te passer des documents, mais je n'ai pas scanné la bonne face.

Salut.

Tu sais, aujourd'hui, il fait beau chez moi. Je suis à la maison, le nain est encore malade, c'est pénible, j'en ai marre de rater des cours, du travail.

Salut.

Le pied de menthe est reparti, même s'il avait l'air mort. Il me fait penser à nous. Mais je n'ai pas d'arrosoir assez grand pour t'atteindre.

Salut.

J'ai envie de tout claquer, mais j'en ai pas la force. Ou alors, c'est l'inverse, je ne sais plus. Enfin, tu vois, j'ai toujours des couleurs dans la tête.

Salut.

Je connais encore ta peau sous mes doigts, dans ma bouche. Toutes ces sensations sont mieux restées que ton visage.

Salut.

Les voisins ont finalement éteint l'alarme fumée. Tu peux revenir, ça ne fait plus ce bruit désagréable, avec des points roses qui se plantent dans ta rétine.

Salut.

Je suis désolée, j'arrête pas de le répéter. Mais tu sais, j'ai passé des années à me faire du mal. Comme tu es moi, tu devrais comprendre tout ce que ça implique. Je ne veux pas te faire comme je me fais, mais ça arrive. Quand on marche sur les bords des trottoirs, forcément, des fois on tombe, non ?

Hey, j'ai ouvert des choses, j'en ai fermé d'autres. Et puis, j'ai ouvert et fermé des choses qui étaient les mêmes, aussi. Je parle à des dizaines de fantômes inutiles, qui font pâle figure face au poids de ta réalité. Tout ce qu'ils amènent, ce sont des fils argentés qui ressemblent à tes cheveux.

Des fois, j'ai juste envie de mourir. Tu le sais, hein. Toutes les vignes, tout ça, ce n'est que tu vent, mais ça fait envie. Le reste est trop compliqué, la masse des choses, des mots, des faits, ça influe trop. Et ça embrigade bien trop de choses avec, comme un grand coup de vent.

Je me rappelle dans une voiture, nos espaces vitaux écrasés l'un contre l'autre.

Je me rappelle cette sensation quand je t'ai rejoint au soleil, qu'on avait marché.

Je me rappelle ton rire, et tes questions, et les miennes, et toutes ces choses qu'on faisait pour se rassurer. Comment tu me dirais bonjour ? Je pense que si je te revois un jour, si un jour vraiment j'ai cette chance, je t'embrasserai. C'est tout ce dont j'ai envie. Cacher mon visage contre toi.

Tu sais, j'ai une image en tête, c'est quelqu'un qui descend des escaliers, et quand je le vois, je suis immensément heureuse.

Je ne sais pas si tu as déjà ressenti ce bonheur-là.

C'est celui que je ressens quand je passe des heures à t'attendre, mais que tout d'un coup je t'imagine apparaître.

C'est comme un soleil qui enfle en moi et me réchauffe.

Le problème, c'est qu'il a tendance à s'éteindre. Alors je fais semblant. Semblant de te voir ici, au coin d'une rue. Là, derrière un arbre. Je le sais, je t'ai vu sous un brin d'herbe hier. Je ne t'ai pas appelé, tu avait l'air trop occupé avec une goutte d'eau. Je t'ai vu tout à l'heure, dans le reflet d'une vitre. Je t'ai vu mais tu t'es effacé comme le volute d'une cigarette. Tu devais avoir des choses à faire, tisser des mobiles de lumière au dessus d'un lit devant la vitre du dehors, par exemple.

À chaque instant qui passe, j'ai envie de chercher. De creuser. Te venir te chercher, je ne sais pas où, mais d'y aller. J'en ai envie, tellement, mais je ne le fais pas, tu m'as dit de ne pas le faire, alors je dois arrêter, c'est ça ? Mais chaque minute qui passe me prive d'un millier de vies avec toi. Je t'en supplie, réponds-moi. J'ai besoin de savoir, j'ai besoin de toi. J'ai besoin de te chanter des paroles qui me viennent en tête. J'ai besoin de ton souffle, et qu'on respire à nouveau ensemble, tu sais, tu le sais ce que je veux dire.

Je t'en prie.

J'ai besoin de parler encore avec toi. Au moins, ça, au moins.

Je pleure tout le temps.

J'essaye de rester normale pour les cours, parce que je n'aime pas qu'on me pose de questions.

Mais je pleure tout le temps.

Des larmes d'encre s'écrasent sur mes feuilles, le graphite bave et j'ai envie de me heurter contre les murs aussi violemment que je te l'ai imposé. Tout ça et je tombe sans cesse, aussi. Je chute sans fin, comme Alice dans le terrier, qui tombe sans s'arrêter.

Je t'en prie.

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